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Les 100 ciels

une globule méchante jetée nonchalamment sur le monde

Petit mode d'emploi à l'usage des dictateurs

1984, le roman (d'anticipation) de George Orwell est un chef d'oeuvre traumatique qui explique par le menu, le B.A BA d'une dictature. Etant donné que l'Homme ne sait pas jouir de sa liberté lorsqu'on la lui offre, les tordus maîtres du monde estiment donc que l'esclavage est la seule méthode pour tenir les troupeaux humains en ordre rangé. Mais pour abolir la liberté tout en évitant de se confronter à des révoltes, il faut abolir...la pensée. Comment ? En détruisant les livres, les souvenirs, les mots, et en réinventant un langage  basique limitant l'échange entre les humains à son strict minimum : travaille, mange, dors, travaille, mange, dors etc ...Toute émotion humaine est bannie, tout mode de pensée détruit, les humains sont devenus des zombis que l'on maintient en vie uniquement pour servir le Parti d'Océania. Car un humain qui pense, qui réfléchit est un humain qui peut constater de son triste sort et se rebiffer. Trop dangereux. La seule émotion conservée : la peur, car la peur permet de modeler n'importe quel humain. Le but des dirigeants du Parti : avoir le pouvoir brut. C'est tout, rien de plus. Pour maintenir les gens dans cette obéissance au quotidien, Big Brother les regarde via des télécrans. Non pas le télécran le jeu qui fait scrouitch scrouitch quand on le secoue, mais des écrans où l'oeil de Big Brother surveille partout, en permanence. Interdiction de penser, de rêver, d'écrire, de lire, tout est banni, et on aliène les humains en les matraquant de messages de propagandes tels que : "grâce à la politique de Big Brother, notre économie a fait un bond en avant de 40% !  Vive Big Brother qui sait offrir une vie merveilleuse à tous nos citoyens". Dans cette société apocalyptique décrite par Orwell les philosophies sont : l'argent c'est le bonheur, dénoncer c'est protéger, produire c'est reconstruire, l'ignorance c'est la force, la liberté c'est l'esclavage, la guerre c'est la paix et les humains ne sont que des codes barres.
Big Brother, cela ne vous rappelle rien ? C'est le nom donné à la toute première émission de télé réalité au monde (Loft Story en France). Ceci n'est pas un hasard.


Si les humains d'Océania portent des bonnets d'Inuit, ce n'est pas pour être à la mode.C'est pour n'être plus que des ombres d'eux-mêmes ...

La version théâtre est originale car elle lie aussi le cinéma. Des écrans géants modulables racontent des bribes d'histoires qui sont la continuité ou le complément de l'histoire vécue sur scène, ce qui donne une plus grande force à la pièce. Dès l'entrée dans la salle, on est figé. La pièce n'est pas commencée que l'on est déjà impressionnés. Je ne vous dis pas le pourquoi du comment, pour vous laisser le suspens de la  surprise, afin que vous ressentiez ce que j'ai pu ressentir...J'ai cru que j'allais en perdre mon petit slip. Ambiance suffocante, angoissante dans laquelle on se sent, comme le héros, constamment épié. Des yeux posés sur nous, 1984 raconte en partie notre vie avec la télé, internet, les caméras de surveillance dans nos villes, les fichiers Edvige et compagnie. Une vie sous surveillance où le libre arbitre n'est plus qu'une illusion.

Parfois, les écrans vidéos se fractionnent, se brisent sur les visages des humains, une parabole visuelle extrêmement forte sur des âmes elles-mêmes brisées. On suit donc le parcours d'un humain, qui dès le départ défie les lois en tenant un journal intime. Sébastien Jeannerot, l'acteur qui interpère Winston, est simplement formidable, on vit avec lui sa peur constante. De ce monde glacial va pourtant naître une romance. Florence Nilsson alias Julia est tout aussi excellente dans sa démesure. L'amour est bien évidemment hors la loi. On imagine la suite...

Image
Winston est inquiet...il a raté le premier prime de la Ferme Célébrités en Afrique, il ne sait pas s'il va s'en remettre

La violence physique montrée dans la pièce n'est que le miroir de la violence psychologique que nous vivons aujourd'hui. Même si nous connaissons la chance de vivre dans un pays démocratique, l'ère de la  non-pensée et du contrôle des humains n'est peut-être pas si loin. Il faut voir de ses yeux, ce que deviendrait un monde dénué d'humanité, un monde où la torture psychologique règle tous les maux. On vide chaque humain de sa substance, on le force à voir ce quoi devant il veut fermer les yeux, on le force à croire que 2+2=5  puisque telle est la décision du Parti et qu'aucune autre alternative n'est possible. Cela n'est pas sans faire penser aux médias actuels qui nous gavent d'informations presque toutes modifiées, un trop plein jusqu'à vomir, illusion de liberté, mais véritable purge de l'intelligence.

A un moment, Winston demande à l'un des chefs du Parti : "Big Brother existe t-il vraiment?" . A t-il besoin d'être sûr de son existence pour y croire, y adhérer vraiment ? Le parallèle avec la dictature des religions est très net : on croit sans être sûrs de l'existence de Dieu.

Il faut absolument voir cette pièce qui se joue jusqu'au 26 février dans le petit théâtre de Ménilmontant. Vous n'en ressortirez pas indemnes.

Pour en savoir plus, c'est ici :  http://www.infoceania.org/

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R
<br /> J'avais lu le roman d'Orwell, et tu sais quoi... j'y pense depuis quelques années déjà, avec cette apothéose de la vaccination à tout prix, et des puces injectables pour détecter si on est porteur<br /> ou non du virus H1N1<br /> Mais je ne savais pas qu'une pièce avait été tirée du roman<br /> Dès qu'elle arrive à Toulouse, j'y vais..<br /> <br /> <br />
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